jeudi 7 octobre 2010

Chroniques d'un été aux coloris Coeur d'Alène‏

Visage: partie du corps que d'autres voient plus souvent que soi, à moins d'être marchand de miroirs, maladivement narcissique ou propriétaire d'un palais des glaces.
Le visage est à la communication ce que le tremplin est à la découverte spatiale: une première intuition qu'il ne faut pas négliger.
Certains corps, par ailleurs sculpturaux, ont l'amusant désavantage d'être surmontés par des visages plus que quelconques. Le contraire, en revanche, est bien plus tragique, car rien n'est plus triste qu'un grotesque couronné par le minois de Mona Lisa.
A une certaine époque, il était de bon ton d'associer des traits du visage à des caractéristiques morales, ce qui est ignorer l'incroyable sens de l'humour du hasard: Ainsi, cet homme aux yeux et mentons fuyants, sur lequel est inscrit en fluorescent le mot fouine, peut être le plus bienheureux des philanthropes, tandis que cet autre, qui semble n'avoir quitté qu'à regret les peaux de bête et l'os contondant, le plus délicat des joueurs de théorbe.
Il est des visages comme des murs borgnes et sans lumière, d'autres comme des chars de carnaval, d'outrance et coloris. Certains portent du poison dans leurs sourire, d'autres d'inestimables halos truculents aux coin des dents, il en est des terreux, des obscurs, des fardés dont aucun mardi gras ne voudrait. Des angéliques qui dissimulent sous une paire d'ailes blanches un poignard recourbé, des visages de tourbe, mous et sans façon. Des débonnaires, des tordus, des laids, tout simplement. Certains que l'on oublie, d'autres qui sont comme la marée sur notre mémoire, gagnant inexorablement tous nos souvenirs. Il en est même pareils aux éclairs, qui impriment la rétine et la marquent à jamais.
Tous, ô lecteur, ne sont que masques en enfilade et sans fin.
Mais même les masques ne mentent pas toujours.

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